Histoire 03

Prologue

La décision de quitter la ville pour s’installer à la campagne murissait depuis plusieurs années dans l’esprit de Monsieur et Madame Morin-Diallo. Les problèmes d’asthme de Sarah, la petite dernière, et les plaintes incessantes des voisins lorsque les jumeaux Lucas et Salomon jouaient dans la cour de leur résidence du centre-ville de Lyon avaient fini par les convaincre de faire le grand saut. Alors, un matin d’août, les cinq Lyonnais accompagnés de leur chien et de leur chat s’étaient installés dans un coin reculé d’Ardèche au bord de la rivière la Bourges, dans une jolie maison de pierre abandonnée depuis seulement six mois. La santé déclinante du couple de retraités qui y avait vécu les avait poussés à rejoindre la vallée non loin d’un centre hospitalier et des services qu’il proposait aux personnes âgées. Les parents Morin-Diallo, Laurence et Driss, tout sourires, se réjouissaient. Enfin ils réalisaient leur rêve, offraient à leurs enfants de sept et douze ans un cadre de vie proche de la vie sauvage, où l’air était peu pollué et qui permettrait à leur progéniture d’évoluer au grand air, dans un milieu sain au plus près de la nature. Dès les premiers jours, la respiration de Sarah se fit plus fluide, aucun accès de toux à déplorer, son teint s’était éclairci, elle était radieuse, son père et sa mère s’en félicitait. Quant aux garçons, ils n’en revenaient pas de disposer d’un terrain de jeu qui leur semblait illimité. Ils couraient dans les bois, dévalaient les pentes à s’en couper le souffle, sautaient dans les cascades, s’aspergeaient d’eau dans la rivière, hurlant et riant sans déranger personne, un vrai bonheur.
Or, ce dont aucun d’entre eux ne se doutait, c’était que le vide de la maison qu’ils venaient d’investir n’était qu’apparent. En effet, cachés dans les nombreux recoins des deux étages que les Morin-Diallo occupaient, ainsi que dans le grenier, dans la cave, au beau milieu de ce qui avait été un potager, sur la rivière et partout sur ses rives, fourmillait un grand nombre d’espèces de la faune et de la flore locale. Des bactéries invisibles à l’œil nu, des insectes plus ou moins faciles à vivre, des reptiles surtout de petites tailles, des mammifères petits et grands, jusqu’aux oiseaux qui volaient librement au-dessus de la nouvelle demeure de Laurence et de Driss. Sans le savoir, les cinq bipèdes citadins et leurs deux animaux de compagnie bouleversaient tout un écosystème qui avait appris à exister sans devoir composer avec des humains.
Laurence entreprit d’abord de s’occuper du jardin qu’elle voulait rendre joli. Elle s’arma d’une énorme paire de ciseaux en métal et d’autres ustensiles et commença par se charger des mauvaises herbes : elle défrichait, éliminait toutes les plantes qui lui semblaient laides ou inutiles, une hécatombe. Dans la remise, Driss fut ravi de trouver une tondeuse à gazon dont le réservoir contenait encore suffisamment de carburant. Afin de rendre les alentours de leur propriété plus ordonnée, il sortit l’engin, et l’alluma. Un bruit de moteur vint perturber le calme à une centaine de mètres à la ronde, semant l’effroi dans la nature, d’autant que la fumée noire qui s’en échappait était irrespirable. Alors qu’ils jouaient dans le lit de la rivière, les deux garçons n’hésitaient pas à s’emparer de cailloux qu’ils jetaient à la surface pour s’éclabousser, sans se rendre compte qu’ils retiraient leurs abris à des crustacés livrés subitement sans secours aux attaques de leurs prédateurs. Leur chien, encore jeune et turbulent, ne sachant plus où donner du museau, pourchassait les papillons affolés, creusait la terre en arrachant les racines nécessaires à la survie des plantes, ses jeux détruisaient aussi l’habitat d’insectes incapables de vivre au grand jour. Le chat aussi jubilait, il avait à sa disposition un vaste terrain de chasse où les rongeurs dont il raffolait, découvraient bien trop tard son habileté et sa redoutable efficacité. Le petit félin ne mit pas vingt-quatre heures à s’adapter à son nouvel environnement, il en devint le principal prédateur.
En se rencontrant, deux univers qui n’aspiraient pourtant qu’à vivre en paix entraient en collision. Mais, ignorés par les humains, c’était au monde des plantes et des animaux de réagir, d’observer attentivement le comportement des nouveaux venus afin de s’y adapter, puis de trouver rapidement les moyens de cohabiter avec ceux qu’ils considéraient comme des intrus qui leur compliquaient l’existence.

Histoire 03
Pierre Ducrozet

En route vers l’île mystérieuse

La ville flottante largue les amarres. Il règne une belle ambiance à bord. Salomé fait la connaissance d’Octavio, botaniste mexicain, et d’Olabisi, océanologue congolaise, pendant que Kamel échange avec Stacey, peintre néo-zélandaise, et un biologiste brésilien, Roberto.
Ils passent quelques journées ainsi, à courir partout sur le bateau, à rencontrer tout le monde, à ouvrir grands les yeux devant ce qui apparaît au large : immensités bleues, bouts de terres isolées, dauphins qui sautent, et le soleil qui s’étale le soir sur l’horizon rose ardent. C’est magnifique, et les deux amis ne s’en lassent pas.
Des jours passent. L’incroyable ville flottante avance, attachée aux gigantesques voiles. Voilà à quoi elle ressemble :
Photo en pièce jointe
On peut vivre sur ou sous l’eau. On nage avec les orques. La mer devient leur jardin.
Le Tribord accoste une première fois sur les côtes sénégalaises. Chacun part alors faire ses relevés, et on se retrouve à la nuit tombée pour manger des légumes aux noms rares cuits au feu de bois. On s’endort comme ça, dans l’air frais du soir.
 En fait, c’est un peu le tour du monde de Darwin, mais 160 ans plus tard, dit Roberto.
 Oui, c’est ça, dit Kamel qui ne voit pas du tout de quoi il parle.
Réveil à l’aube, on a encore du chemin – le capitaine reprend les commandes. Il reste plus de deux semaines de navigation jusqu’à la fameuse île. Le Tribord file sur les eaux carbone.
Kamel observe ses nouveaux amis qui s’activent sans cesse. Il faut notamment explorer le fond des océans, dont 40% nous sont encore inconnus ! Mais aussi détailler les nouvelles espèces marines, explorer les terres abordées, guetter dans le ciel les oiseaux migrateurs… Le monde est immense et complexe, pense Kamel, accoudé au bastingage, et je ne le connais pas.
Salomé est à côté de lui, qui regarde en silence le soleil se noyer dans l’océan.
Puis ils vont dormir dans leurs petits lits étroits. Salomé aimerait bien tenir la main de Kamel, mais celui-ci s’endort, comme toujours, en deux secondes.
Ils se réveillent avec le mal de mer, se lèvent tout de suite et se mettent au travail : Salomé au piano, Kamel à son ordinateur pour mixer, et chanter aussi. Tout leur matériel est installé dans leur cabine. Ils veulent trouver la meilleure manière de raconter ce voyage.
Et finalement, un matin, quelque chose se dessine au loin.
Une forme, une île.
Terre ! Terre !
Le bateau accoste, et tous les membres de l’équipage se ruent vers l’île, sidérés par sa beauté.
Salomé et Kamel font la connaissance de l’équipe qui vit toute l’année ici. Patrick et Vivian les emmènent faire un grand tour de l’île.
Et là, au premier virage, les voilà qui surgissent de partout : des tigres, des rhinocéros, des oiseaux si beaux dont ils ignorent le nom, des papillons ; il y a même, au loin, un panda qui caresse son enfant.
 Et puis il y a tout ce que vous ne voyez pas, dit Patrick, les insectes, les plantes, tout le tissu du vivant qu’on a implanté ici, d’une complexité et d’une puissance folle.
 Et ça fonctionne ? demande Kamel. Les espèces arrivent à cohabiter ?
 Oui, dit Vivian. On a fait en sorte qu’elles soient « compatibles », qu’elles se connaissent, qu’elles puissent vivre ensemble.
 C’est incroyable, dit Salomé. L’arche de Noé du 21e siècle.
Le soir, toute l’expédition se réunit. Il y a eu des disputes ces derniers jours, dans l’équipe : on n’est pas d’accord sur les directions à prendre. Olabisi, notamment, est en colère :
 C’est artificiel, cette île. C’est pas comme ça qu’on va sauver le monde, en le préservant. Il faut le réinventer, pas le sauvegarder comme sur un disque dur.
 Et puis il y a un problème, dit Caroline : les animaux meurent, ici aussi. Ils ne retrouvent pas leur milieu idéal.
 Ce que vous oubliez, dit Patrick, c’est que ce lieu n’est que provisoire. On se rassemble ici, on sauve, on évite que le tigre du Bengale ou le rhinocéros de Java disparaissent complètement, puis on les laisse se reproduire et repeupler le monde.
 C’est pareil : il faut changer notre manière d’être, sinon on ne changera pas. Ce n’est pas comme ça qu’on va y arriver, dit Olabisi.
 Il y a quand même eu des choses intéressantes. Il y a notamment eu des hybridations nouvelles, quelque part sur l’île, entre certaines espèces. C’est peut-être une voie à suivre.
 On avait dit des alliances entre les espèces, dit Roberto, pas des mélanges.
La conversation court ainsi quand on entend, tout à coup, un grand bruit.
Salomé se retourne vers la porte. Elle passe la tête. Elle n’arrive pas à croire ce qu’elle voit.

Histoire 03
Collège Molière 1

2/ À LA DÉCOUVERTE DE L’ÎLE !

En regardant par la porte du bateau, Salomé découvre un paysage enchanteur : la mer qui entoure l’île est transparente. On peut y apercevoir des poissons de toutes les couleurs et des récifs de corail de toutes les tailles. Sur l’île, les arbres sont gigantesques, plantés dans du sable blanc fin. Les animaux vivent en harmonie, et on a l’impression qu’ils ont créé des cabanes pour s’abriter. La nourriture a l’air abondante.

Après un temps à s’extasier sur le paysage, l’équipage se met à chercher l’origine du bruit précédemment survenu. Quelques temps plus tard, un groupe de moussaillons vient signaler une fissure dans la coque du bateau, due à un récif. Cependant, l’équipage tente d’accoster, tâche qui ne leur est pas aisée étant donné la fissure dans la coque. Après de longs efforts et de maintes erreurs, ils finissent par accoster sur l’île.

Salomé descend du bateau et arrive sur la plage, dont le sable s’étend sur la côte à perte de vue. Soudain, elle aperçoit une silhouette qui se dessine au loin. Intriguée, la jeune femme s’en approche. C’est un jeune orang-outan qui joue avec des coquillages. En apercevant Salomé, l’orang-outan, heureux d’avoir de la visite, s’approche et lui tend la main. Salomé, devant cette marque d’affection, décide de lui trouver un nom :
« Comment je pourrais t’appeler toi… Pourquoi pas Bernard ?
 Beernaar ? répète l’orang-outan d’une voix étonnée. »
Le reste de l’équipage accoste et Salomé les rejoint, suivie par Bernard.

Pour pouvoir bien dormir et protéger leur matériel, les scientifiques doivent monter un complexe qui abritera à la fois leurs lits et leur matériel : le Tyrannosoruxrex. Ils débarquent et commencent à l’assembler. Il fait chaud, les plans sont compliqués : ils transpirent et ne comprennent rien. Au bout de deux heures très fatigantes, ils ont terminé de construire le campement !

Après avoir pris un peu de repos, les membres de l’expédition décident de se répartir en deux groupes distincts : un premier groupe étudiera les animaux qui peuplent l’île, tandis qu’un second groupe ira cartographier l’île. Salomé propose :
« Quelqu’un a-t-il une préférence ?
 J’irais volontiers avec le second groupe, répond Kamel, j’ai toujours adoré la géographie !
 Ca tombe bien, j’apprécie beaucoup d’être avec les animaux, répond Salomé, et en plus ça me permet d’être avec Bernard : je me joindrai donc au premier groupe !
 Je viens avec toi Salomé, renchérit Octavio, impatient de découvrir la faune qui peuple l’île.
 De mon côté, j’aimerais bien étudier la géologie de l’île : Kamel, je peux être dans ton groupe, demande Olabisi ?
 Bonne idée, tes connaissances en océanologie nous seront précieuses pour cartographier le littoral ! »

Le lendemain matin, les deux équipes se lancent dans leur exploration, en se donnant rendez-vous à la base au coucher du soleil. Salomé, Octavio et leur groupe décident de prendre la marche vers le nord de l’île. Sur le chemin, ils rencontrent une famille d’ours, et au gré de leur périple, ils croisent des perroquets, des babouins puis des singes. Ils entendent tout à coup un barrissement de rhinocéros et prennent la décision d’aller jeter un coup d’œil. Ils surprennent le rhinocéros dans une mauvaise posture, sur le dos. Octavio essaie donc de l’aider, épaulé par quelques camarades, mais il est trop lourd. Soudain, un lion fait son apparition et sauve le rhinocéros en lui rentrant dedans. L’animal rescapé peut repartir et eux reprennent leur chemin.

Pendant ce temps, le second groupe, mené par Kamel, part vers l’ouest à la découverte de l’île : au bout d’un certain temps, Olabisi aperçoit au loin une cascade qui se déverse sur le lac. Voici le premier élément à mettre sur leur carte : ils décident de s’y rendre pour examiner les lieux. C’est à ce moment qu’ils découvrent une grotte derrière la cascade. Ils ne veulent pas prendre de risques et prennent donc la décision de quitter les lieux et de poursuivre leur exploration.

En début d’après-midi, Salomé et le premier groupe amorcent le retour vers leur base pour regrouper les données récoltées. Sur le chemin, ils tombent par hasard sur une grotte masquée par une superbe cascade. En entrant dans la cavité, ils tombent nez à nez avec un animal étonnant, d’une espèce inconnue, qui a une tête d’aigle et le corps d’un lion. Le zoologue murmure :
« On dirait un griffon !
 Je croyais que ce n’était qu’un animal mythologique, réplique Salomé ! »
Les scientifiques, enthousiasmés par cette découverte extraordinaire, se demandent comment cette espèce est apparue.

Pendant que Salomé et ses compagnons s’interrogent sur cet étrange animal, le deuxième groupe atteint une forêt peuplée d’habitats d’animaux, semblables à des maisons humaines. Ils explorent alors rapidement ces étranges cabanes : en entrant dans une de ces maisons, ils découvrent que les animaux peuvent survivre sans les hommes !

Le groupe de Salomé, après leur découverte extraordinaire, commence à être fatigué. Octavio dit alors :
« Regardez, une clairière là-bas !
 Oui, allons-y, répondit Salomé ! »
Ils s’approchent et découvrent dans la clairière des œufs géants dans un trou. Ils avancent, Salomé demande des cordes au botaniste pour descendre en rappel. Ils commencent à pénétrer dans la faille mais ils entendent un grand battement d’ailes…

Pendant ce temps, le groupe de Kamel poursuit son chemin, mais au bout d’un certain temps, Olabisi suggère, inquiète :
« Le soleil commence à se coucher, on devrait peut-être rentrer ?
 D’accord, répond Kamel, nous pouvons prendre ce chemin pour rejoindre la base. »
Ils commencent donc à rebrousser chemin et entendent comme des voix au loin, ils s’approchent du bruit et voient une faille gigantesque. Impressionnés, ils s’avancent mais Olabisi les prévient :
« Il ne faudrait peut-être pas trop s’approcher. Ca a l’air glissant et assez dangereux !
 D’accord, on ira chercher des cordes demain pour descendre, mais là il fait trop sombre, ne commençons pas à prendre des risques inutilement. »
Ils continuent leur chemin et rentrent.

Une fois rentrés à la base, Kamel, Olabisi et leur groupe ne voient pas leurs camarades de l’autre équipe. La base est déserte : ils se demandent où Salomé, Octavio et les autres peuvent bien être… Peut-être ont-ils fait une fantastique découverte, ce qui expliquerait leur absence au point de rendez-vous ? Kamel propose alors d’attendre un peu, pour voir s’ils finissent par rentrer…. « Et si dans deux heures on n’a toujours pas de nouvelles, je partirai à leur recherche », se dit-il. Au bout d’une heure, l’inquiétude de Kamel grandit, et il propose alors à Olabisi de partir à leur recherche sans attendre. Celle-ci lui répond que partir de nuit, dans un environnement inconnu, est trop dangereux, et qu’il vaut mieux attendre que le jour se lève : ils partiront alors tous ensemble. Le lendemain matin, les membres du premier groupe s’activent pour partir à la recherche de leurs amis disparus, et Kamel suggère à Olabisi de commencer leurs recherches près de la faille où ils ont entendu, la veille, ces mystérieux cris « presque humains » : peut-être y retrouveront-ils Salomé, Octavio et les autres...

Histoire 03
Pierre Ducrozet

3/ A l’assaut de la plage

Ils repartent à l’aube, chargés de leurs sacs, le visage tendu. Ils avancent tous comme ça, tassés sur leurs jambes, aux aguets.
Ils arrivent avant que le soleil n’émerge sur les hauteurs. Ils s’allongent au sol et attendent.
C’est le plan que Kamel et Olabisi ont mis au point la veille : on se met en position, on prend nos jumelles et on observe. A un moment donné, on va bien voir quelque chose.
Le soleil monte. Doucement. Ils ne distinguent rien. Dans la cuvette, rien ne bouge.
C’est pourtant bien là-bas qu’ils ont entendu des bruits, hier, des cris de bête, ou d’humains, difficile à dire, quelque chose entre les deux, quelque chose d’indicible et d’affreux qui les a glacés.
Patrick se lève pour se dégourdir les jambes quand :
 Là ! crie Kamel.
Tout à coup des corps qui s’activent, tout à coup de grands objets qu’on déplace. Tout le groupe fixe ses jumelles et retient son souffle. Ce sont des cages, en fer. Et dedans, il y a des formes. Vivantes.
 Là, je vois Bernard, l’orang-outan de Salomé, chuchote Octavio.
Kamel se tourne vers lui. Ils ont retrouvé leurs amis.
 Bon, maintenant on fait quoi ? demande Kamel.
 Il faut qu’on trouve une manière intelligente d’avancer, dit Olabisi. Ces gars-là, en bas, ils ont pas l’air de trop rigoler.
 Voilà ce que je propose, dit Octavio : on continue à observer, et dès qu’on a tout quadrillé, on y va.

Une heure plus tard, ils se lancent.
Ils ne peuvent plus attendre : les braconniers sont en train d’amener toutes les cages sur le rivage, dans lesquelles croupissent les animaux rares qui avaient été recueillis sur l’île – et leurs amis ! Ils ont réussi, par quelque miracle, à trouver un bateau, sur lequel ils s’apprêtent à embarquer toutes ces cages, et à partir !
Kamel et sa bande s’approchent. Maintenant ! dit Kamel. Olabisi et Patrick lancent les deux cocktails Molotov qu’ils viennent de préparer, loin sur le côté, pour faire diversion. Lesquels explosent sur le bord de la colline dans un grand fracas, puis l’herbe commence à prendre feu. Trois des braconniers se tournent vers la colline et se mettent à courir vers le feu qui grandit.
Pendant ce temps, Kamel et sa bande passent par l’autre côté de la vallée et arrivent jusqu’au rivage.
 Eh, vous !
Des mitraillettes sont braquées sur eux. Ils se jettent tous à terre – tous sauf Octavio. Toi aussi, lui crie les trois braconniers, à terre ! On entend un bruit derrière lui qui monte, qui monte. Alors Octavio se retourne, et les braconniers voient fondre sur eux une masse énorme, tous les animaux de l’île réunis, gorilles, girafes, éléphants, pumas, tigres, et au-dessus d’eux les toucans, les aigles et les cigognes, tous les animaux s’élancent vers la plage.
 Aaaaaargh !...
Les braconniers crient et se mettent à courir.
Ils disparaissent au loin.
La plage se transforme en une grande fête de retrouvailles, les chimpanzés sautent sur le dos des éléphants, les flamands roses esquissent des pas de danse.
Kamel court vers les cages.
 Kamel ! crie Salomé, recroquevillée dans l’une d’elles. Merci ! J’ai tellement soif.
Son ami ouvre la cage et lui jette une bouteille d’eau.
Salomé est pleine de terre, les cheveux en broussaille, l’air pâle.
 C’est fini, dit Kamel en la prenant dans ses bras. C’est fini.
Ils ouvrent une à une toutes les portes. Les panthères, les pélicans, les pandas roux menacés d’extinction, que les braconniers s’apprêtaient à revendre à prix d’or, sortent de leurs cages et marchent sur le sable, devant l’eau turquoise qui miroite à l’infini.

Histoire 03
Collège Vendôme

Salomé

Toutes les espèces d’animaux se dirigent vers le navire de façon très précipitée. Un guépard placé en tête sur la passerelle d’embarcation pousse un feulement, imité par les autres félins. Des secousses provoquées par le poids des animaux sur la passerelle troublent l’embarquement, ce qui retarde le départ. Les animaux commencent à s’agiter. C’est l’anarchie totale ! Heureusement que Kamel remet de l’ordre en tirant un coup de feu en l’air. Il fait le recensement des pandas roux : ils sont au nombre de vingt-cinq. Malheureusement, il se rend compte qu’il manque sûrement le dernier né de la famille nombreuse.

Les cages sont prêtes à accueillir les braconniers. Difficilement, ces derniers, dépités et forcés par le reste de l’équipage, se dirigent vers leurs cellules. Ils se remémorent leurs tentatives de captures et regrettent leurs actes. L’un des braconniers essaye de se rebeller et de s’enfuir avant d’être enfermé. Sa tentative échoue rapidement car aucun de ses coéquipiers ne l’aide. L’équipage commence à embarquer les chasseurs sur le bateau. "Laissez-nous sortir !" crient les braconniers. Ils poussent des hurlements de fureur ou de frayeur. Après plusieurs heures d’acharnement, l’équipage réussit enfin à les charger dans le navire.

Une fois sur le bateau, Patrick décide d’entrer discrètement dans le bureau de Salomé pour essayer de récupérer les clefs qui permettraient de libérer ses camarades prisonniers. Arrivé devant le bureau de Salomé, il force la porte, s’approche du placard à côté de son bureau et fouille dans tous les coins. Après plusieurs minutes de recherche, il trouve les clefs dans une boîte dans le fond d’un tiroir et les prend. Il ouvre la porte quand soudain Salomé le surprend en train de sortir de son bureau :
"Patrick ?! Que faisais-tu dans mon bureau ? 
 Mais ... je ... c’est une abominable méprise et ...
 Non, ne te fous pas de moi ! Je t’ai très bien vu sortir !"
Patrick serre le poing dans lequel se trouvent les clefs.
"Et que tiens-tu dans tes mains ? Mais qu’est-ce que cela signifie ?
 Salomé, tu en sais trop." 

Salomé se jette sur Patrick. Elle est en larmes. Ses poings frappent aveuglement le traitre, toute sa colère et sa peur se condensent dans ses coups. Soudainement, elle sent une main la frapper, fort. Elle tombe au sol. Patrick sort un pistolet. Salomé est paralysée de terreur. Elle sent son cœur lui remonter jusqu’à la gorge.
"Je ne pensais pas que j’allais devoir en arriver là, Salomé. Je commençais vraiment à m’attacher à toi, mais c’est de ta faute, tu n’aurais pas dû te mêler des affaires qui ne te regardent pas.
 Tu n’es pas un assassin ! crie Salomé. Tu ne vas pas me tuer !
 Non je ne suis pas un meurtrier, mais je dois te tuer. Tu ne délivreras ce secret à personne ..."
Coup de feu. 
Salomé s’écroule au sol, la balle l’a atteinte au cœur. Elle ouvre sa bouche et dans un dernier fragment d’énergie, apercevant un visage qui lui semble familier, elle murmure : "Bernard ..."

Bernard, l’orang-outan, est dévasté et fou de rage en voyant le corps inanimé de Salomé. Il saute sur Patrick, le mord violemment aux mollets, au bras et à la cheville et le traîne jusque sur le pont, mais Patrick résiste et sort son arme.
"Espèce de sale orang-outan, tu fais moins le malin maintenant !" 
Bernard esquive la balle du pistolet de Patrick de justesse ! C’est un combat acharné qui est en train de se produire. Les tensions sont de plus en plus fortes, mais Patrick prend l’avantage sur Bernard et s’apprête à le pousser dans l’eau. Bernard exécute un mouvement de côté et pousse le traître de toutes ses forces dans l’océan. Patrick se débat dans l’eau, il hurle de rage et de fureur sur l’orang-outang. 
"Imbécile de singe ! Je me vengerai ! Je reviendrai un jour pour vous faire la misère !"
Bernard prend le corps mort de Salomé dans ses bras en pleurant de douleur.

Quelques semaines plus tard ...

"Cette aventure prend fin les amis. 
 Il nous reste désormais à placer nos animaux sous protection dans une réserve naturelle, rappelle Adam Thobias. 
 Une réserve naturelle ? s’interroge Kamel.
 Oui, il nous faut trouver un nouvel endroit sûr pour les animaux, alors nous avons eu cette idée. Elle serait située sur une île à l’ouest de la Corse, facilement accessible de l’hexagone pour que nos scientifiques n’aient pas à y vivre et puissent se déplacer en cas de besoin. 
 Comment l’imaginez-vous ?
 La réserve serait sur une grande plaine avec des plans d’eau, des rochers, de grands espaces verts pour que les animaux puissent galoper en liberté. 
 C’est une super idée ! Il faudrait organiser des trajets pour visiter l’ile ! Faisons un détour vers le sud pour pouvoir découvrir cette future réserve naturelle. 
 Nous l’appellerons Salomé, pour rendre hommage à notre amie, une aventurière courageuse qui s’est battue pour notre cause jusqu’au bout."

Paroles de la chanson :

Salomé

Refrain :
Salomé, Salomé
Aventurière et courageuse
Déterminée mais épuisée
En paix je veux que tu reposes

Couplet 1 :
Des guépards, des pandas roux
Crocodiles et des hiboux
Ours polaires et compagnie
Dans un bateau ils sont partis

Refrain :
Salomé, Salomé
Aventurière et courageuse
Déterminée mais épuisée
En paix je veux que tu reposes

Couplet 2 :
Patrick décide d’entrer
Dans le bureau de Salomé
Soudain Salomé le voit
Et là ... c’est le coup d’envoi !

Histoire 03
Pierre Ducrozet

En route vers l’île mystérieuse

La ville flottante largue les amarres. Il règne une belle ambiance à bord. Salomé fait la connaissance d’Octavio, botaniste mexicain, et d’Olabisi, océanologue congolaise, pendant que Kamel échange avec Stacey, peintre néo-zélandaise, et un biologiste brésilien, Roberto.
Ils passent quelques journées ainsi, à courir partout sur le bateau, à rencontrer tout le monde, à ouvrir grands les yeux devant ce qui apparaît au large : immensités bleues, bouts de terres isolées, dauphins qui sautent, et le soleil qui s’étale le soir sur l’horizon rose ardent. C’est magnifique, et les deux amis ne s’en lassent pas.
Des jours passent. L’incroyable ville flottante avance, attachée aux gigantesques voiles. Voilà à quoi elle ressemble :
Photo en pièce jointe
On peut vivre sur ou sous l’eau. On nage avec les orques. La mer devient leur jardin.
Le Tribord accoste une première fois sur les côtes sénégalaises. Chacun part alors faire ses relevés, et on se retrouve à la nuit tombée pour manger des légumes aux noms rares cuits au feu de bois. On s’endort comme ça, dans l’air frais du soir.
 En fait, c’est un peu le tour du monde de Darwin, mais 160 ans plus tard, dit Roberto.
 Oui, c’est ça, dit Kamel qui ne voit pas du tout de quoi il parle.
Réveil à l’aube, on a encore du chemin – le capitaine reprend les commandes. Il reste plus de deux semaines de navigation jusqu’à la fameuse île. Le Tribord file sur les eaux carbone.
Kamel observe ses nouveaux amis qui s’activent sans cesse. Il faut notamment explorer le fond des océans, dont 40% nous sont encore inconnus ! Mais aussi détailler les nouvelles espèces marines, explorer les terres abordées, guetter dans le ciel les oiseaux migrateurs… Le monde est immense et complexe, pense Kamel, accoudé au bastingage, et je ne le connais pas.
Salomé est à côté de lui, qui regarde en silence le soleil se noyer dans l’océan.
Puis ils vont dormir dans leurs petits lits étroits. Salomé aimerait bien tenir la main de Kamel, mais celui-ci s’endort, comme toujours, en deux secondes.
Ils se réveillent avec le mal de mer, se lèvent tout de suite et se mettent au travail : Salomé au piano, Kamel à son ordinateur pour mixer, et chanter aussi. Tout leur matériel est installé dans leur cabine. Ils veulent trouver la meilleure manière de raconter ce voyage.
Et finalement, un matin, quelque chose se dessine au loin.
Une forme, une île.
Terre ! Terre !
Le bateau accoste, et tous les membres de l’équipage se ruent vers l’île, sidérés par sa beauté.
Salomé et Kamel font la connaissance de l’équipe qui vit toute l’année ici. Patrick et Vivian les emmènent faire un grand tour de l’île.
Et là, au premier virage, les voilà qui surgissent de partout : des tigres, des rhinocéros, des oiseaux si beaux dont ils ignorent le nom, des papillons ; il y a même, au loin, un panda qui caresse son enfant.
 Et puis il y a tout ce que vous ne voyez pas, dit Patrick, les insectes, les plantes, tout le tissu du vivant qu’on a implanté ici, d’une complexité et d’une puissance folle.
 Et ça fonctionne ? demande Kamel. Les espèces arrivent à cohabiter ?
 Oui, dit Vivian. On a fait en sorte qu’elles soient « compatibles », qu’elles se connaissent, qu’elles puissent vivre ensemble.
 C’est incroyable, dit Salomé. L’arche de Noé du 21e siècle.
Le soir, toute l’expédition se réunit. Il y a eu des disputes ces derniers jours, dans l’équipe : on n’est pas d’accord sur les directions à prendre. Olabisi, notamment, est en colère :
 C’est artificiel, cette île. C’est pas comme ça qu’on va sauver le monde, en le préservant. Il faut le réinventer, pas le sauvegarder comme sur un disque dur.
 Et puis il y a un problème, dit Caroline : les animaux meurent, ici aussi. Ils ne retrouvent pas leur milieu idéal.
 Ce que vous oubliez, dit Patrick, c’est que ce lieu n’est que provisoire. On se rassemble ici, on sauve, on évite que le tigre du Bengale ou le rhinocéros de Java disparaissent complètement, puis on les laisse se reproduire et repeupler le monde.
 C’est pareil : il faut changer notre manière d’être, sinon on ne changera pas. Ce n’est pas comme ça qu’on va y arriver, dit Olabisi.
 Il y a quand même eu des choses intéressantes. Il y a notamment eu des hybridations nouvelles, quelque part sur l’île, entre certaines espèces. C’est peut-être une voie à suivre.
 On avait dit des alliances entre les espèces, dit Roberto, pas des mélanges.
La conversation court ainsi quand on entend, tout à coup, un grand bruit.
Salomé se retourne vers la porte. Elle passe la tête. Elle n’arrive pas à croire ce qu’elle voit.

Histoire 03
Collège Molière 1

2/ À LA DÉCOUVERTE DE L’ÎLE !

En regardant par la porte du bateau, Salomé découvre un paysage enchanteur : la mer qui entoure l’île est transparente. On peut y apercevoir des poissons de toutes les couleurs et des récifs de corail de toutes les tailles. Sur l’île, les arbres sont gigantesques, plantés dans du sable blanc fin. Les animaux vivent en harmonie, et on a l’impression qu’ils ont créé des cabanes pour s’abriter. La nourriture a l’air abondante.

Après un temps à s’extasier sur le paysage, l’équipage se met à chercher l’origine du bruit précédemment survenu. Quelques temps plus tard, un groupe de moussaillons vient signaler une fissure dans la coque du bateau, due à un récif. Cependant, l’équipage tente d’accoster, tâche qui ne leur est pas aisée étant donné la fissure dans la coque. Après de longs efforts et de maintes erreurs, ils finissent par accoster sur l’île.

Salomé descend du bateau et arrive sur la plage, dont le sable s’étend sur la côte à perte de vue. Soudain, elle aperçoit une silhouette qui se dessine au loin. Intriguée, la jeune femme s’en approche. C’est un jeune orang-outan qui joue avec des coquillages. En apercevant Salomé, l’orang-outan, heureux d’avoir de la visite, s’approche et lui tend la main. Salomé, devant cette marque d’affection, décide de lui trouver un nom :
« Comment je pourrais t’appeler toi… Pourquoi pas Bernard ?
 Beernaar ? répète l’orang-outan d’une voix étonnée. »
Le reste de l’équipage accoste et Salomé les rejoint, suivie par Bernard.

Pour pouvoir bien dormir et protéger leur matériel, les scientifiques doivent monter un complexe qui abritera à la fois leurs lits et leur matériel : le Tyrannosoruxrex. Ils débarquent et commencent à l’assembler. Il fait chaud, les plans sont compliqués : ils transpirent et ne comprennent rien. Au bout de deux heures très fatigantes, ils ont terminé de construire le campement !

Après avoir pris un peu de repos, les membres de l’expédition décident de se répartir en deux groupes distincts : un premier groupe étudiera les animaux qui peuplent l’île, tandis qu’un second groupe ira cartographier l’île. Salomé propose :
« Quelqu’un a-t-il une préférence ?
 J’irais volontiers avec le second groupe, répond Kamel, j’ai toujours adoré la géographie !
 Ca tombe bien, j’apprécie beaucoup d’être avec les animaux, répond Salomé, et en plus ça me permet d’être avec Bernard : je me joindrai donc au premier groupe !
 Je viens avec toi Salomé, renchérit Octavio, impatient de découvrir la faune qui peuple l’île.
 De mon côté, j’aimerais bien étudier la géologie de l’île : Kamel, je peux être dans ton groupe, demande Olabisi ?
 Bonne idée, tes connaissances en océanologie nous seront précieuses pour cartographier le littoral ! »

Le lendemain matin, les deux équipes se lancent dans leur exploration, en se donnant rendez-vous à la base au coucher du soleil. Salomé, Octavio et leur groupe décident de prendre la marche vers le nord de l’île. Sur le chemin, ils rencontrent une famille d’ours, et au gré de leur périple, ils croisent des perroquets, des babouins puis des singes. Ils entendent tout à coup un barrissement de rhinocéros et prennent la décision d’aller jeter un coup d’œil. Ils surprennent le rhinocéros dans une mauvaise posture, sur le dos. Octavio essaie donc de l’aider, épaulé par quelques camarades, mais il est trop lourd. Soudain, un lion fait son apparition et sauve le rhinocéros en lui rentrant dedans. L’animal rescapé peut repartir et eux reprennent leur chemin.

Pendant ce temps, le second groupe, mené par Kamel, part vers l’ouest à la découverte de l’île : au bout d’un certain temps, Olabisi aperçoit au loin une cascade qui se déverse sur le lac. Voici le premier élément à mettre sur leur carte : ils décident de s’y rendre pour examiner les lieux. C’est à ce moment qu’ils découvrent une grotte derrière la cascade. Ils ne veulent pas prendre de risques et prennent donc la décision de quitter les lieux et de poursuivre leur exploration.

En début d’après-midi, Salomé et le premier groupe amorcent le retour vers leur base pour regrouper les données récoltées. Sur le chemin, ils tombent par hasard sur une grotte masquée par une superbe cascade. En entrant dans la cavité, ils tombent nez à nez avec un animal étonnant, d’une espèce inconnue, qui a une tête d’aigle et le corps d’un lion. Le zoologue murmure :
« On dirait un griffon !
 Je croyais que ce n’était qu’un animal mythologique, réplique Salomé ! »
Les scientifiques, enthousiasmés par cette découverte extraordinaire, se demandent comment cette espèce est apparue.

Pendant que Salomé et ses compagnons s’interrogent sur cet étrange animal, le deuxième groupe atteint une forêt peuplée d’habitats d’animaux, semblables à des maisons humaines. Ils explorent alors rapidement ces étranges cabanes : en entrant dans une de ces maisons, ils découvrent que les animaux peuvent survivre sans les hommes !

Le groupe de Salomé, après leur découverte extraordinaire, commence à être fatigué. Octavio dit alors :
« Regardez, une clairière là-bas !
 Oui, allons-y, répondit Salomé ! »
Ils s’approchent et découvrent dans la clairière des œufs géants dans un trou. Ils avancent, Salomé demande des cordes au botaniste pour descendre en rappel. Ils commencent à pénétrer dans la faille mais ils entendent un grand battement d’ailes…

Pendant ce temps, le groupe de Kamel poursuit son chemin, mais au bout d’un certain temps, Olabisi suggère, inquiète :
« Le soleil commence à se coucher, on devrait peut-être rentrer ?
 D’accord, répond Kamel, nous pouvons prendre ce chemin pour rejoindre la base. »
Ils commencent donc à rebrousser chemin et entendent comme des voix au loin, ils s’approchent du bruit et voient une faille gigantesque. Impressionnés, ils s’avancent mais Olabisi les prévient :
« Il ne faudrait peut-être pas trop s’approcher. Ca a l’air glissant et assez dangereux !
 D’accord, on ira chercher des cordes demain pour descendre, mais là il fait trop sombre, ne commençons pas à prendre des risques inutilement. »
Ils continuent leur chemin et rentrent.

Une fois rentrés à la base, Kamel, Olabisi et leur groupe ne voient pas leurs camarades de l’autre équipe. La base est déserte : ils se demandent où Salomé, Octavio et les autres peuvent bien être… Peut-être ont-ils fait une fantastique découverte, ce qui expliquerait leur absence au point de rendez-vous ? Kamel propose alors d’attendre un peu, pour voir s’ils finissent par rentrer…. « Et si dans deux heures on n’a toujours pas de nouvelles, je partirai à leur recherche », se dit-il. Au bout d’une heure, l’inquiétude de Kamel grandit, et il propose alors à Olabisi de partir à leur recherche sans attendre. Celle-ci lui répond que partir de nuit, dans un environnement inconnu, est trop dangereux, et qu’il vaut mieux attendre que le jour se lève : ils partiront alors tous ensemble. Le lendemain matin, les membres du premier groupe s’activent pour partir à la recherche de leurs amis disparus, et Kamel suggère à Olabisi de commencer leurs recherches près de la faille où ils ont entendu, la veille, ces mystérieux cris « presque humains » : peut-être y retrouveront-ils Salomé, Octavio et les autres...

Histoire 03
Pierre Ducrozet

3/ A l’assaut de la plage

Ils repartent à l’aube, chargés de leurs sacs, le visage tendu. Ils avancent tous comme ça, tassés sur leurs jambes, aux aguets.
Ils arrivent avant que le soleil n’émerge sur les hauteurs. Ils s’allongent au sol et attendent.
C’est le plan que Kamel et Olabisi ont mis au point la veille : on se met en position, on prend nos jumelles et on observe. A un moment donné, on va bien voir quelque chose.
Le soleil monte. Doucement. Ils ne distinguent rien. Dans la cuvette, rien ne bouge.
C’est pourtant bien là-bas qu’ils ont entendu des bruits, hier, des cris de bête, ou d’humains, difficile à dire, quelque chose entre les deux, quelque chose d’indicible et d’affreux qui les a glacés.
Patrick se lève pour se dégourdir les jambes quand :
 Là ! crie Kamel.
Tout à coup des corps qui s’activent, tout à coup de grands objets qu’on déplace. Tout le groupe fixe ses jumelles et retient son souffle. Ce sont des cages, en fer. Et dedans, il y a des formes. Vivantes.
 Là, je vois Bernard, l’orang-outan de Salomé, chuchote Octavio.
Kamel se tourne vers lui. Ils ont retrouvé leurs amis.
 Bon, maintenant on fait quoi ? demande Kamel.
 Il faut qu’on trouve une manière intelligente d’avancer, dit Olabisi. Ces gars-là, en bas, ils ont pas l’air de trop rigoler.
 Voilà ce que je propose, dit Octavio : on continue à observer, et dès qu’on a tout quadrillé, on y va.

Une heure plus tard, ils se lancent.
Ils ne peuvent plus attendre : les braconniers sont en train d’amener toutes les cages sur le rivage, dans lesquelles croupissent les animaux rares qui avaient été recueillis sur l’île – et leurs amis ! Ils ont réussi, par quelque miracle, à trouver un bateau, sur lequel ils s’apprêtent à embarquer toutes ces cages, et à partir !
Kamel et sa bande s’approchent. Maintenant ! dit Kamel. Olabisi et Patrick lancent les deux cocktails Molotov qu’ils viennent de préparer, loin sur le côté, pour faire diversion. Lesquels explosent sur le bord de la colline dans un grand fracas, puis l’herbe commence à prendre feu. Trois des braconniers se tournent vers la colline et se mettent à courir vers le feu qui grandit.
Pendant ce temps, Kamel et sa bande passent par l’autre côté de la vallée et arrivent jusqu’au rivage.
 Eh, vous !
Des mitraillettes sont braquées sur eux. Ils se jettent tous à terre – tous sauf Octavio. Toi aussi, lui crie les trois braconniers, à terre ! On entend un bruit derrière lui qui monte, qui monte. Alors Octavio se retourne, et les braconniers voient fondre sur eux une masse énorme, tous les animaux de l’île réunis, gorilles, girafes, éléphants, pumas, tigres, et au-dessus d’eux les toucans, les aigles et les cigognes, tous les animaux s’élancent vers la plage.
 Aaaaaargh !...
Les braconniers crient et se mettent à courir.
Ils disparaissent au loin.
La plage se transforme en une grande fête de retrouvailles, les chimpanzés sautent sur le dos des éléphants, les flamands roses esquissent des pas de danse.
Kamel court vers les cages.
 Kamel ! crie Salomé, recroquevillée dans l’une d’elles. Merci ! J’ai tellement soif.
Son ami ouvre la cage et lui jette une bouteille d’eau.
Salomé est pleine de terre, les cheveux en broussaille, l’air pâle.
 C’est fini, dit Kamel en la prenant dans ses bras. C’est fini.
Ils ouvrent une à une toutes les portes. Les panthères, les pélicans, les pandas roux menacés d’extinction, que les braconniers s’apprêtaient à revendre à prix d’or, sortent de leurs cages et marchent sur le sable, devant l’eau turquoise qui miroite à l’infini.

Histoire 03
Collège Vendôme

Salomé

Toutes les espèces d’animaux se dirigent vers le navire de façon très précipitée. Un guépard placé en tête sur la passerelle d’embarcation pousse un feulement, imité par les autres félins. Des secousses provoquées par le poids des animaux sur la passerelle troublent l’embarquement, ce qui retarde le départ. Les animaux commencent à s’agiter. C’est l’anarchie totale ! Heureusement que Kamel remet de l’ordre en tirant un coup de feu en l’air. Il fait le recensement des pandas roux : ils sont au nombre de vingt-cinq. Malheureusement, il se rend compte qu’il manque sûrement le dernier né de la famille nombreuse.

Les cages sont prêtes à accueillir les braconniers. Difficilement, ces derniers, dépités et forcés par le reste de l’équipage, se dirigent vers leurs cellules. Ils se remémorent leurs tentatives de captures et regrettent leurs actes. L’un des braconniers essaye de se rebeller et de s’enfuir avant d’être enfermé. Sa tentative échoue rapidement car aucun de ses coéquipiers ne l’aide. L’équipage commence à embarquer les chasseurs sur le bateau. "Laissez-nous sortir !" crient les braconniers. Ils poussent des hurlements de fureur ou de frayeur. Après plusieurs heures d’acharnement, l’équipage réussit enfin à les charger dans le navire.

Une fois sur le bateau, Patrick décide d’entrer discrètement dans le bureau de Salomé pour essayer de récupérer les clefs qui permettraient de libérer ses camarades prisonniers. Arrivé devant le bureau de Salomé, il force la porte, s’approche du placard à côté de son bureau et fouille dans tous les coins. Après plusieurs minutes de recherche, il trouve les clefs dans une boîte dans le fond d’un tiroir et les prend. Il ouvre la porte quand soudain Salomé le surprend en train de sortir de son bureau :
"Patrick ?! Que faisais-tu dans mon bureau ? 
 Mais ... je ... c’est une abominable méprise et ...
 Non, ne te fous pas de moi ! Je t’ai très bien vu sortir !"
Patrick serre le poing dans lequel se trouvent les clefs.
"Et que tiens-tu dans tes mains ? Mais qu’est-ce que cela signifie ?
 Salomé, tu en sais trop." 

Salomé se jette sur Patrick. Elle est en larmes. Ses poings frappent aveuglement le traitre, toute sa colère et sa peur se condensent dans ses coups. Soudainement, elle sent une main la frapper, fort. Elle tombe au sol. Patrick sort un pistolet. Salomé est paralysée de terreur. Elle sent son cœur lui remonter jusqu’à la gorge.
"Je ne pensais pas que j’allais devoir en arriver là, Salomé. Je commençais vraiment à m’attacher à toi, mais c’est de ta faute, tu n’aurais pas dû te mêler des affaires qui ne te regardent pas.
 Tu n’es pas un assassin ! crie Salomé. Tu ne vas pas me tuer !
 Non je ne suis pas un meurtrier, mais je dois te tuer. Tu ne délivreras ce secret à personne ..."
Coup de feu. 
Salomé s’écroule au sol, la balle l’a atteinte au cœur. Elle ouvre sa bouche et dans un dernier fragment d’énergie, apercevant un visage qui lui semble familier, elle murmure : "Bernard ..."

Bernard, l’orang-outan, est dévasté et fou de rage en voyant le corps inanimé de Salomé. Il saute sur Patrick, le mord violemment aux mollets, au bras et à la cheville et le traîne jusque sur le pont, mais Patrick résiste et sort son arme.
"Espèce de sale orang-outan, tu fais moins le malin maintenant !" 
Bernard esquive la balle du pistolet de Patrick de justesse ! C’est un combat acharné qui est en train de se produire. Les tensions sont de plus en plus fortes, mais Patrick prend l’avantage sur Bernard et s’apprête à le pousser dans l’eau. Bernard exécute un mouvement de côté et pousse le traître de toutes ses forces dans l’océan. Patrick se débat dans l’eau, il hurle de rage et de fureur sur l’orang-outang. 
"Imbécile de singe ! Je me vengerai ! Je reviendrai un jour pour vous faire la misère !"
Bernard prend le corps mort de Salomé dans ses bras en pleurant de douleur.

Quelques semaines plus tard ...

"Cette aventure prend fin les amis. 
 Il nous reste désormais à placer nos animaux sous protection dans une réserve naturelle, rappelle Adam Thobias. 
 Une réserve naturelle ? s’interroge Kamel.
 Oui, il nous faut trouver un nouvel endroit sûr pour les animaux, alors nous avons eu cette idée. Elle serait située sur une île à l’ouest de la Corse, facilement accessible de l’hexagone pour que nos scientifiques n’aient pas à y vivre et puissent se déplacer en cas de besoin. 
 Comment l’imaginez-vous ?
 La réserve serait sur une grande plaine avec des plans d’eau, des rochers, de grands espaces verts pour que les animaux puissent galoper en liberté. 
 C’est une super idée ! Il faudrait organiser des trajets pour visiter l’ile ! Faisons un détour vers le sud pour pouvoir découvrir cette future réserve naturelle. 
 Nous l’appellerons Salomé, pour rendre hommage à notre amie, une aventurière courageuse qui s’est battue pour notre cause jusqu’au bout."

Paroles de la chanson :

Salomé

Refrain :
Salomé, Salomé
Aventurière et courageuse
Déterminée mais épuisée
En paix je veux que tu reposes

Couplet 1 :
Des guépards, des pandas roux
Crocodiles et des hiboux
Ours polaires et compagnie
Dans un bateau ils sont partis

Refrain :
Salomé, Salomé
Aventurière et courageuse
Déterminée mais épuisée
En paix je veux que tu reposes

Couplet 2 :
Patrick décide d’entrer
Dans le bureau de Salomé
Soudain Salomé le voit
Et là ... c’est le coup d’envoi !