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Prologue

Localisation : Un bunker sous terre au milieu du Sahara
Année : 2050
Jour et heure : cela ne nous importe plus, maintenant que le monde est détruit, nous n’avons plus l’heure mais nous avons le temps : enfin !

Je n’ai rien oublié de mon ancienne vie, de tout ce que j’ai perdu, de la beauté d’un coucher de soleil, du mouvement lent et majestueux des vagues sur la plage de mon enfance, des histoires que me racontait ma mère. Je n’ai rien oublié du rire joyeux de mes propres enfants jouant à la balle au prisonnier dans le jardin. Rien non plus de ma sœur et mon frère, de notre enfance de petits noirs dans un village de France qui nous a tôt appris à affronter l’adversité. Je n’oublie pas que j’ai été heureuse. J’ai construit ma force et mon énergie, j’ai pu penser l’avenir malgré le Grand Effondrement parce que je savais que ce bonheur-là était possible, qu’une communauté bienveillante, imaginative pouvait sauver du pire des malheurs.
Je suis la plus vieille du projet, c’est moi qui l’ait conçu. Ici, il m’appelle tous Vieille Mère.
J’ai tout perdu au moment du Grand Effondrement en 2030. Tous ceux que j’aimais, ma maison, ma famille, les couchers de soleil, la mer, le chant doux des oiseaux au printemps, la caresse du vent sur mon visage, la table garnie et les amis en fête. Tout !
Depuis des décennies les puissants se faisaient la guerre. Ils fabriquaient des armes sophistiquées, ils n’avaient pas envisagé que leur avidité, leur quête d’un pouvoir hégémonique finiraient par créer notre perte à tous. Le budget de la défense était de plus en plus important, au détriment de la santé, du bien commun. L’éducation avait été abandonnée, la santé des plus fragiles délaissée, ils nous avaient transformés en corps brisés, malades, mal-éduqués, effrayés et méchants. Ils avaient permis que la terre soit abimée pour le confort immédiat de certains, ils avaient moqués, contredits les scientifiques qui prédisaient le désastre écologique en cours. Alors même que les tempêtes étaient plus virulentes, les incendies plus destructeurs et que des sécheresses terribles nous rendaient plus fragiles, ils avaient réussi à nous convaincre que l’étranger était le plus grand danger qui soit, à nous monter les uns contre les autres jusque dans notre intimité. Et quand ils avaient utilisé leurs armes, leurs bombes, nous avions applaudi parce que ce n’était pas contre nous mais contre des hommes, des femmes, des enfants que l’on nous désignait comme ennemis. Des personnes que nous n’avions jamais vu, qui vivaient à des milliers de kilomètres de nous et que nous les autorisions à massacrer parce qu’ils nous répétaient « c’est eux ou vous ! »
Je suis née à la fin du siècle dernier, j’étais là, j’ai tout vu. J’ai, inscrit dans ma mémoire comme un tatouage au fer rouge, la première bombe nucléaire et celles qui ont suivies en rétorsion. Je ne sais plus qui a commencé. Il n’y a plus personne pour écrire cette histoire. Je ne sais plus si c’était la Chine, les USA, la Russie, Israël ou la France. Dans le Projet Anticipation, nous avons compris qu’aucune guerre n’est nécessaire, aucune ne se gagne. Le premier sang versé à l’origine du monde crie vengeance et dans un cercle pervers, dévastateur, les mêmes horreurs se reproduisent.
J’étais ce qu’on appelait en ce temps-là une nerd. Très jeune, j’avais compris l’intérêt de l’informatique, du numérique et de la façon dont on pouvait s’en servir soit pour abêtir, dominer, s’enrichir, soit pour rendre les nôtres plus conscients de leur vulnérabilité et plus solidaires. J’ai choisi la seconde option.
Nous étions six femmes : Joyce et Annabella qui nous viennent des Etats Unis et du Brésil, Hua qui est chinoise, Rim qui est libanaise, Chloé française et moi, Sol, diminutif de mon prénom car mes parents m’ont appelée Soleil, prénom que j’ai transformé en Sol, comme le plancher où j’ai besoin de m’arrimer. Pas aussi vaste que la terre, mais Sol, comme l’endroit à la fois modeste et essentiel où tu poses tes pieds à chaque pas.
Le monde allait à vau-l’eau, j’ai contacté les femmes les plus brillantes de leur génération et elles m’ont écoutées quand je leur ai dit, « tout ça va mal se finir, nous devons nous préparer dès à présent à accoucher de l’avenir »
C’est ainsi qu’est né le Projet Anticipation. Le plan B d’un monde qui, c’était à prévoir, a implosé. Nous avons inventé la machine à remonter le temps et décider de réparer notre monde cassé en sauvant Les Vulnérables.



2019-2020
hleroy
SCRIPT | hleroy
FORUM
36

Prologue
Pierre Ducrozet
SCRIPT | Pierre Ducrozet

Tout avait commencé un peu plus tôt dans l’année – quand, Tom ne s’en souvient plus trop, les choses se confondent dans sa tête. Autour de janvier peut-être, des rassemblements de collégiens, lycéens et étudiants avaient commencé à secouer l’Europe puis le monde entier.
Au début, Tom, en 4e au collège Jean Moulin de Lyon, s’en fichait un peu de tout ça. Il avait déjà assez à faire avec ses problèmes à la maison, sa mère ne le laissait pas en paix (ou du moins c’est l’impression qu’il avait), et puis il y avait Léa. Léa sa meilleure amie, Léa sa confidente, Léa qu’il regardait, et qui semblait ne pas le voir.
C’est un après-midi comme un autre, un mardi, et Tom est assis avec Mehdi et Léa sur le banc vert juste en face de l’entrée du collège, devant la montée du Gourguillon, dans le quartier de St-Just.
 Vous avez vu ? demande Léa.
 Quoi ? dit Mehdi.
 A Bruxelles, à Berlin, à Londres, partout y a des manifs pour le climat, dit Léa. On n’arrête pas d’en parler, partout. Et nous, là, on est assis sur un banc.
 Ouais, mais c’est notre banc, dit Tom. Il est cool, moi je l’aime bien.
 Merde, mec, dit Léa, nous aussi il faut qu’on fasse quelque chose.
 Oui, mais quoi ? dit Mehdi.
 Manifester, montrer ce qu’on pense. C’est pas énorme, mais c’est déjà ça.
Ils se regardent, les trois amis, un peu dubitatifs. Il fait déjà chaud, ce jour de mars.
 Ok, mais on peut aller acheter un dernier pot de Nutella avant ? dit Tom dans un sourire.

Ça a commencé comme ça, par des trucs cons. Tom voulait plaire à Léa, qui, elle, y croyait à fond – alors il s’est dit ok, moi aussi. Mehdi était inquiet, révolté, en colère, il ne savait pas trop quels mots poser sur ce qui leur arrivait, à tous. Et Léa n’arrivait pas à comprendre comment on pouvait foutre notre propre planète en l’air, comme ça, sans réagir. C’était insensé.
Alors quand le mouvement mondial se mit en place, elle le suivit avec ardeur. Tom et Mehdi aussi, à moitié pour suivre leur amie, à moitié pour la cause qui commençait à sérieusement les préoccuper.
Car chaque jour apportait son lot de nouvelles alarmantes : fonte des glaces, disparition des animaux vertébrés, ouragans, hausse des températures, la Terre craquait de toutes parts.
Ils avaient commencé à lire et chercher des choses sur l’histoire des énergies fossiles, le fonctionnement de l’effet de serre, la dégradation des sols, des mers, à la fois effrayés et fascinés par ce qu’ils apprenaient.
Léa se mit en contact avec les nouvelles organisations militantes, et notamment avec Naomi Lehner, la jeune Allemande qui avait lancé le mouvement Youth for the Future, lequel, en quelques semaines, avait essaimé dans le monde entier. Chaque vendredi, désormais, des milliers de collégiens et lycéens des cinq continents faisaient grève pour protester contre ce qui était en train d’arriver. Ils avaient compris (et Léa aussi) qu’une poignée de personnes (industriels, pétroliers, gérants de grandes entreprises, toutes les pièces maîtresses du système économique mondial) leur avaient volé à tous leur planète, leur futur. Et ça, ils n’étaient pas prêts à l’accepter.

Léa et Naomi commencèrent à échanger sur Telegram, un réseau protégé. Elles parlaient de choses et d’autres, de tout ce qui se passait dans ces nouveaux mouvements, bien sûr, mais aussi de choses plus banales, de leurs vies quotidiennes, de ce qui les amusait. Elles devinrent amies.
Mais bientôt les beaux jours arrivèrent, la fin des cours aussi, un dernier grand rassemblement le 19 juin et ce furent les vacances, chacun repartit dans son coin, Tom dans les Landes, Mehdi dans les Alpes, Léa en Dordogne dans la maison de campagne de ses grands-parents, et Naomi quelque part en Italie. Les jours s’allongèrent. On passa doucement à autre chose.

FORUM
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Presentation
Patrick Vincent

Cher visiteur, lecteur,

Nous sommes fiers de vous présenter la collection 2020 des nouvelles écrites par les collégiens avec l’auteur Pierre Ducrozet. Ces cadavres exquis ont maintenant été relus, corrigés, édités par les classes et par l’auteur.

Voici l’heure de les rendre publics, de vous permettre de déplier les version de travail et de télécharger les 11 nouvelles corrigées pour les lire sur vos tablettes ou pour les imprimer.

Vous pouvez à tout moment retrouver le processus de fabrication des histoires à cette adresse.

Bonne lecture !

SCRIPT | Patrick Vincent

Dix classes de collégiens et un écrivain écrivent un cadavre exquis.

Ici, une fiction s’élabore en adaptant les règles du cadavre exquis, ce « jeu littéraire » inventé par les surréalistes : Pierre Ducrozet écrit un prologue puis un premier chapitre dont seules les dernières lignes sont visibles par les élèves. Puis chaque classe poursuit cette amorce selon le même principe, de sorte qu’un texte se tisse au fil de l’année, alternant les écrits de l’écrivain et ceux des élèves.

Lors de chaque livraison de texte, les auteurs publient également une fiche signalétique qui rassemble des indices ou donne des pistes pour s’inspirer et poursuivre (détails sur l’intrigue, les personnages, références littéraires, scientifiques et artistiques).

Durant l’écriture, l’écrivain et les élèves lisent un livre choisi collectivement.